Lorsque je suis confrontée à une nouveauté, un changement, un événement inédit que je ne peux pas anticiper, je ne peux me raccrocher à rien, de fait.
Entre le moment où je me sens déstabilisée par cet imprévu et le moment où je me mets à l’action, je me sens flottante, en déséquilibre.
Je pourrais avoir ma tête qui surchauffe, mon cœur qui palpite, une boule dans le ventre, dans la gorge… Mon corps m’envoie le signal que, potentiellement, je vis un danger.
Quelle est ma stratégie face à cette incertitude ?
J’ai longtemps réagi face aux imprévus, aux crises en répondant aux injonctions de la réussite : « je sais faire seul », « tout va bien, je suis une warrior », « même pas peur, même pas mal ».
Et surtout, je ne prenais pas le temps d’écouter pleinement ce qui se passait en moi.
Cette stratégie, notre société nous pousse à l’adopter et à montrer que nous contrôlons la situation « tout est sous contrôle », « je gère ».
En faisant comme cela, je renvoie l’image d’une personne qui n’a besoin de rien, de personne. Et je n’ose d’ailleurs pas demander de soutien ; « pas la peine, je vais y arriver seule ». Quelle pression je me mets et quelle dissonance je vis avec moi-même !
Et pourtant, quoi de plus normal que de se sentir en vulnérabilité face à l’inconnu ?
Quelle est la part de notre humanité que nous taisons, que nous mettons sous le tapis pour faire bonne figure ?
Alors que nous sommes des êtres de ressentis, d’éprouvés et que la vulnérabilité s’invite inévitablement dans notre quotidien.
« Les valeurs des sociétés occidentales post-modernes viennent flatter et jouer avec notre narcissisme en proposant des modèles de réussite, de force et de jeunesse dans lesquels vulnérabilité et fragilité sont exclues, voire déniées ».
Pierre-André Beley, article « Vulnérabilités : du macrosocial à la situation de psychothérapie » – Cahiers de Gestalt-Thérapie 2018/2 – n°40
Comme je l’évoquais, ce schéma a été le mien pendant près de 40 ans. Un schéma bien rodé, où je faisais semblant en mode « poker face ». L’image que je renvoyais était celle d’une personne forte, agile, qui n’avait besoin de personne et qui réussissait.
Je croyais que la réussite c’était justement de me montrer toute puissante… Et pour autant, malgré les gros obstacles que je dépassais – seule, mon sentiment de réussite était éphémère, voire inexistant en moi quand les autres y voyaient quelque chose de plus grandiose que moi… Je pouvais d’ailleurs ressentir de la solitude, à cet endroit.
Qu’est-ce que l’accès à ma vulnérabilité a permis ?
Aujourd’hui, je me sens réussir grâce à ma vulnérabilité car je suis sortie de cette toute puissance. Je me rapproche de mon authenticité. Je trouve un chemin pour y accéder, pour la nommer ; je me sens aujourd’hui complète.
Depuis, mon contact avec mon environnement change ; je reçois plus de soutien, d’empathie, d’accueil à mon égard. Mon image renvoyée n’est plus la même.
Je me sens alors légère, apaisée, plus grande et plus proche de l’humilité.
Ma stratégie à l’épreuve de l’incertitude est de me laisser traverser par toutes les sensations, les pensées, les images que cette situation me fait vivre. Je prends le temps, j’ose la nommer à mon entourage, mes partenaires.
Nous trouvons alors un espace ensemble pour trouver des clés, des solutions pour y faire face.
Et vous, quelle est votre stratégie à l’épreuve de l’incertitude ?
